Loury a décidé de faire de l’aventure son métier. Il a traversé seul, il y a quelques semaines, le plus grand glacier d’Europe. Son audace et sa personnalité m’ont touché. Je l’ai donc contacté et sans surprise il a accepté avec enthousiasme de se livrer à un petit exercice de questions réponses pour Aventure Pyrénéenne.

DE LA BANALITÉ À L’EXCEPTION

Eruptiön : l'expédition de LouryL’histoire de Loury c’est celle d’un écorché vif qui a commencé sa vie comme tant d’autres dans la violence, l’exclusion, la drogue, la délinquance… Ce qui rend son parcours exceptionnel, c’est d’avoir su capitaliser sur des expériences de vie désastreuses pour se forger un mental à toute épreuve.
Aujourd’hui, le dépassement de soi est une philosophie de vie qui lui a permis de parcourir des centaines de kilomètres et à traverser en solitaire l’un des plus grands glaciers d’Europe : le Vatnajökul. Quasiment aussi grand que la Corse, il recouvre plusieurs volcans par 1000 m de glace.

RACONTE-NOUS TON PARCOURS DE VIE. COMMENT DEVIENT-ON AVENTURIER ?

LouryToutes ces épreuves m’ont aidé à me forger le caractère et à considérer le dépassement de soi comme une philosophie. Survivre est devenu un réflexe. Ma force c’est mon mental, mon humour, le fait de relativiser sur la mort et sur la réelle place que nous occupons dans ce monde. Je transforme toutes les mauvaises expériences en autant d’apprentissages.

En 2017, j’avais besoin de faire un gros break. Je suis parti en Asie faire la remontée du Mékong en pirogue. Sur place, j’ai fait la connaissance d’un français. Durant nos conversations, il me parle de l’émission « Retour à l’instinct primaire » qui devait être diffusée sur RMC Découverte. Un mois plus tard, une directrice de Casting me contacte. Il m’avait inscrit sans me le dire. Ma participation à l’’émission au départ en binôme s’est transformée en expérience solo car la personne avec qui j’étais a été arrêtée au 4ème jour. Malgré tout, ça a bien marché pour moi. C’est ainsi qu’a commencé mon métier d’aventurier.

ERUPTIÖN : L’EXPÉDITION DE LOURY

L'expédition de Loury en IslandeMon expédition a commencé avant la traversée du Glacier de Vatnajökul. Cette partie m’a permis de m’acclimater aux conditions météorologiques difficiles notamment le froid et le vent. J’ai pris mes marques sur la gestion de l’effort et du matériel. J’ai beaucoup marché sous la pluie en traînant mes pulkas qui s’étaient remplie d’eau sur des portions sans neige. J’ai trouvé mes marques par rapport à ce que j’étais capable de faire physiquement, sur la façon d’organiser mes journées. Ca m’a permis de répondre à multitudes de questions auxquelles je n’avais pas toutes les réponses : A quelle heure je devais me lever ? Combien d’heure j’étais capable de marcher chaque jour ? Comment allais-je digérer la nourriture que j’avais amené ? Comment j’allais gérer mon hygiène ?

Pendant 27 jours j’ai marché 537 Km. J’ai pris mes marques avec l’Islande, la beauté de ses paysages, les conditions météorologiques et avec mes capacités. Je suis arrivé au Glacier plutôt fatigué, mais ça m’avait donné une forte impression de ce à quoi je pouvais m’attendre.

COMMENT L’IDÉE D’UN TEL PROJET A-TELLE GERMÉE ?

L’Islande est une destination polaire très proche de là où je vis habituellement (pays Basque). Je savais que j’allais rencontrer des conditions qui mettrait mon mental et mon physique à l’épreuve. Je cherchais également un challenge : la traversée de la calotte glaciaire.

Et surtout je voulais parler d’un phénomène qui me tient à coeur : les problématiques environnementales générées par le tourisme de masse. Eruptiön est le nom que j’ai trouvé parce qu’il y a des éruptions volcaniques en Islande mais aussi parce qu’aujourd’hui on peut parler d’éruption touristique qui dénature complètement les paysages. Cet expédition était pour moi l’occasion de porter ce message. L’Islande a beaucoup souffert de l’activité touristiques ces dernières années. Si l’on ne fait pas quelque chose rapidement, le paysage sera définitivement dénaturé. En Islande, il y avait 200 000 visiteurs par an il y a 7 ans et aujourd’hui ce sont 3 millions de personnes qui visitent le pays chaque année.

 

RACONTE NOUS TA PLUS GROSSE GALÈRE

Expéditin Eruptiön - Iceland

En réalité j’en ai eu plein ! Mais s’il n’y en avait qu’une à raconter ce serait celle là. Quand je me trouvais sur le glacier j’ai dû faire face à de très forts vents alors que je me trouvais en altitude. Les vents ont dépassé 150 Km/h. Malgré avoir fait le nécessaire pour me protéger, ma tente a cassé en pleine nuit. Vu les condition, j’ai choisi de mettre tout mon matériel dans la tente pour la lester. Durant la nuit, j’ai du réparer ma tente en catastrophe. A ce moment là, ma lampe frontale clignotait, je n’avais plus de batterie. J’ai ensuite passé toute la nuit à tenir les arceaux de peur que la tente ne cède une nouvelle fois. Je passe finalement la nuit sans problème supplémentaire. Je sors soulagé le lendemain et je m’aperçois que les pulkas que j’avais attaché ont été emmené par le vent. Comment faire pour continuer mon expédition sans possibilité de transporter mon matériel ? Ça a été un gros moment de doute. J’ai vraiment cru que c’était la fin de l’aventure.
J’ai pris la décision de revenir en arrière à un refuge en espérant trouver de l’aide. Il n’y avait personne. J’ai récupéré une civière de secours. Je suis retourné jusqu’à mon campement et j’ai récupéré tout mon matériel. Ça m’a permis de pouvoir finir mon expédition.

QUELS SONT TES PROCHAINS PROJETS D’AVENTURE ?

Mon prochain projet se déroulera dans le Grand Nord. Mathieu Belanger est le porteur du projet. Il veut gravir les 7 plus hauts sommets du monde en 7 ans. Il a décidé de d’augmenter la difficulté de ses périples par le franchissement d’un passage difficile.

L’objectif de l’expédition est d’enchaîner la traversée du Grand Nord canadien et l’ascension du Néali en Alaska qui culmine à 6900 m. Aujourd’hui seulement trois personnes ont traversé le Grand Nord canadien dont Mike Horn en solitaire et un binôme de Norvégiens.

Nous sommes en pleine préparation de cette expédition qui débutera en mars 2020 et durera plus de 3 mois. Des grandes marques devraient nous soutenir pour ce projet qui a une toute autre dimension. Le climat est bien plus froid (jusqu’à -70°C) nécessite la gestion de prédateurs comme l’ours polaire, et des connaissances techniques bien plus importante. Nous devons partir prochainement en Norvège pour nous entraîner et tester du matériel.

À AVENTURE PYRÉNÉENNE ON AIMERAIT BIEN MONTER UN STAGE SURVIE AVEC TOI. ÇA T’INTÉRESSE ?

Oui bien sûr ! Je ne me considère pas comme un expert mais j’aimerais partager mon expérience. Un stage de survie abordant les problématiques de l’expédition : préparer son alimentation, quel matériel amener, comment gérer son hygiène corporelle. Il y a plein de questions auxquelles j’ai apporté des réponses par mon expérience. Le manuel expliquant comment préparer une expédition n’existe pas encore. Ou alors je connais pas !

Donc oui on reste en contact !

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